Allocution de la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies à l’occasion de la Journée internationale de lutte contre la corruption
S’unir avec la jeunesse contre la corruption : Former l’intégrité de demain
Distingués invités : en vos rangs, titres, grades et qualités
C’est avec honneur que je prends la parole en ce jour consacré à la lutte contre la corruption. Le thème de cette journée, « S’unir avec la jeunesse contre la corruption : Former l’intégrité de demain », résonne particulièrement fort dans un contexte où les jeunes portent l’espoir d’un avenir meilleur et plus équitable pour Haïti.
La corruption demeure l’un des obstacles majeurs au progrès social et économique. Elle détruit la confiance dans les institutions, compromet l’accès équitable aux services essentiels, et perpétue les inégalités. Pourtant, la jeunesse représente une force transformatrice capable de briser ce cercle vicieux. Les jeunes ne sont pas seulement notre avenir, ils sont notre présent. Investir dans leur potentiel aujourd’hui, c’est investir dans des sociétés justes et inclusives demain. Aujourd'hui, les jeunes sont au cœur des défis mondiaux : qu'il s'agisse de la lutte contre les inégalités sociales, de la défense des droits humains, de la transition énergétique ou des mouvements pour une gouvernance plus inclusive et transparente. Leur vision novatrice et leur capacité à remettre en question les normes établies ouvrent la voie à des solutions concrètes et durables.
En soutenant les jeunes, en leur offrant des opportunités d'apprentissage, de leadership et de participation active, nous créons les conditions nécessaires pour des sociétés où la justice, l'égalité et la durabilité ne sont pas des aspirations lointaines, mais des réalités vécues au quotidien. En intégrant les jeunes dans les processus décisionnels, nous ne faisons pas que préparer l’avenir, mais nous transformons activement le présent. Leur contribution, non seulement dans les domaines politiques et économiques, mais aussi dans l’innovation sociale et la construction de la paix, est essentielle pour bâtir des sociétés résilientes face aux crises mondiales. Il ne s'agit pas d'attendre que les jeunes soient prêts pour les responsabilités de demain, mais bien de les impliquer dès aujourd’hui, de leur permettre de prendre des décisions qui façonneront un avenir équitable et prospère pour tous.
Comme l'a si bien affirmé le Secrétaire général de Nations Unies, António Guterres, « À travers tous les défis actuels, les jeunes appellent à une action audacieuse et accélérée, se solidarisant avec les plus vulnérables et concevant des solutions pour garantir la justice sociale, économique et climatique ainsi que la paix et la prospérité pour tous. » Afin d'élargir leur participation, le Secrétaire général António Guterres appelle les gouvernements à faire de la participation des jeunes la norme, plutôt que l'exception, dans les décisions et les politiques à l'échelle mondiale.
En cette période de transition, où la justice doit répondre aux attentes de la société haïtienne, il est essentiel de souligner que l'intégrité et l'éthique ne sont pas de simples valeurs à suivre, mais constituent les piliers fondamentaux d'un véritable État de droit. Dans ce contexte la Convention des Nations Unies contre la Corruption (CNUCC) est plus pertinente que jamais pour Haïti dans sa lutte contre la corruption et pour la promotion de la transparence, de la responsabilité et de la bonne gouvernance. En tant que cadre juridique international le plus complet pour lutter contre la corruption, la CNUCC fournit aux États parties, y compris Haïti, des lignes directrices pour la prévention et la criminalisation de la corruption, la coopération internationale et la récupération des avoirs mal acquis. La mise en œuvre rigoureuse de cette convention est essentielle pour renforcer le cadre juridique et institutionnel d'Haïti, en garantissant que les lois et politiques nationales soient alignées sur les normes internationales les plus élevées.
En ce sens, L’ULCC a été créée il y a vingt ans avec pour mission de protéger les biens publics, d’assurer une gestion honnête et efficace de l’administration publique et de renforcer la confiance des citoyens dans les institutions de l'État. À travers des initiatives telles que le renforcement du système de déclaration de patrimoine, des actions éducatives auprès de la société, des jeunes et des femmes, les initiatives législatives comme celles portant sur la protection des personnes qui communiquent des informations, le recouvrement des avoirs mal acquis, et l’accès des citoyens à l’information publique, la formation des acteurs judiciaires, l’élaboration de guides techniques, pour ne mentionner que quelques-unes de leurs actions, l’ULCC a établi un cadre important pour prévenir et lutter contre la corruption.
Je tiens spécialement à mentionner à cette occasion les excellentes actions éducatives menées auprès des jeunes, qui témoignent d’une vision reconnaissant leur rôle central dans la construction d’un État de droit. Je tiens également à féliciter l’ULCC pour ces efforts et à reconnaître une fois de plus ses engagements continus dans l’éducation anticorruption des jeunes, qui se matérialisent aujourd’hui avec le concours lancé par l’ULCC, en partenariat avec l’ONUDC :
L’Art kont koripsyon: ankouraje chanjman atravè ekspresyon kreyatif, dedye a elèv lekòl ak mizisyen.
L’Art contre la corruption : favoriser le changement par l’expression créative, dédié aux écoliers et aux musiciens.
Cette initiative n’est qu’un exemple des efforts visant à renforcer la lutte contre la corruption en Haïti. Pour que ces actions portent leurs fruits sur le long terme, il est crucial de consolider le cadre institutionnel et législatif à travers des initiatives concrètes. Parmi ces initiatives, la Task Force Anti-corruption, qui réunit des institutions de contrôle en Haïti, jouerait un rôle essentiel en facilitant la coopération et en assurant la coordination entre les différents acteurs de la justice et de la régulation. De plus, la création des Pôles Judiciaires Spécialisés, dédiés à la lutte contre la criminalité financière, y compris la corruption, ainsi qu’aux crimes de masse, y compris les violences sexuelles, constituerait un pas décisif vers un renforcement du système judiciaire.
Ces initiatives peuvent offrir à Haïti un cadre institutionnel robuste pour mener des enquêtes efficaces contre ces fléaux qui entravent le développement du pays. En assurant une application stricte des lois et en garantissant l’impartialité des processus judiciaires, Haïti pourra créer un environnement où la transparence et la responsabilité prévalent, permettant ainsi de poursuivre les responsables de corruption et de garantir que personne ne soit au-dessus de la loi.
Cette journée est l’occasion de renouveler notre engagement collectif. En tant que SRSG, je réitère notre soutien indéfectible à Haïti. À travers l’ONUDC, HCDH et le PNUD, nous continuerons à accompagner les autorités haïtiennes et la société civile, le secteur privé, les jeunes, les universités et la société dans son ensemble dans leurs efforts pour renforcer la transparence, promouvoir l’intégrité, et bâtir un avenir où la corruption n’aura plus sa place.
Batay sa a p ap janm genyen si chak sitwayen ayisyen pa angaje yo ak mobilize yo. Transparans kòmanse avèk nou chak. Kòm sitwayen, nou gen devwa pou mande kont nan men dirijan nou yo, denonse abi pouvwa, epi defann entegrite nan tout aksyon nou fè. Edikasyon ak sansibilizasyon gen yon wòl santral nan dinamik sa a. Li esansyèl pou nou envesti nan fòmasyon jèn yo, ki se lidè demen, pou yo ka pote epi ankouraje valè pwòpte ak responsablite sa yo.
Cette lutte ne pourra être gagnée sans l'engagement et la mobilisation de chaque citoyen haïtien. La transparence commence par chacun de nous. En tant que citoyens, nous avons le devoir de demander des comptes à nos dirigeants, de dénoncer les abus de pouvoir et de défendre l'intégrité dans toutes nos actions. L’éducation et la sensibilisation jouent également un rôle central dans cette dynamique. Il est crucial que nous investissions dans la formation des jeunes, des leaders de demain, pour qu'ils puissent incarner et promouvoir ces valeurs de probité et de responsabilité.
Nous savons que la lutte contre la corruption est complexe et exige des efforts continus et cohérents. Elle nécessite également un cadre législatif fort, une application rigoureuse des lois, et une société civile vigilante. À cet égard, je tiens à saluer l'engagement de toutes les parties prenantes ici présentes – des représentants des institutions publiques aux acteurs du secteur privé, des médias, des organisations internationales et de la société civile. Votre contribution est essentielle pour créer une société plus transparente, plus juste et plus prospère.
Pour conclure, je tiens à remercier l'ULCC ainsi que toutes les institutions partenaires pour leur rôle essentiel dans l'organisation de cet événement majeur. J'exprime également ma gratitude à nos partenaires, notamment le Fonds des Nations Unies pour la Consolidation de la Paix (PBF) et le Canada et l’Union Européenne pour leur soutien inestimable dans notre lutte commune contre la corruption.
Ansanm, nou ka fè rèv sa a tounen yon reyalite.
Ensemble, nous pouvons faire de ce rêve une réalité.