Déclaration de la Coordonnatrice résidente des Nations Unies en Haïti, à l'occasion de la commémoration de la Journée Internationale pour l'élimination des violences à l'égard des Femmes et des Filles
25 novanm 2023
Port-au-Prince, 25 Novembre 2023
Madame la Ministre à la Condition Féminine et aux Droits des Femmes,
Monsieur le Ministre de L’Éducation Nationale et de la Formation,
Madame la Ministre de la Jeunesse, des Sports et de l'Action Civique,
Madame la Présidente du Haut Conseil de la Transition,
Madame la Représentante Spéciale du Secrétaire général de l'ONU en Haïti,
Mesdames, Messieurs, les cadres des Ministères sectoriels présents,
Chers partenaires de la société civile, des organisations de défense des droits des femmes,
Mesdames et messieurs les membres du corps diplomatique,
Mesdames, Messieurs, Représentantes et Représentants d'agences de coopération,
Chers Collègues chefs d'agences des Nations Unies,
Mesdames, Messieurs de la presse écrite, audio-visuelle et en ligne,
Mesdames et Messieurs, en vos rangs, grades, titres et qualités.
Je suis très honorée d'être en votre compagnie pour commémorer la journée internationale pour l'élimination de la violence faite à l'égard des femmes, qui aussi marque le début de 16 jours d’activisme.
Cette journée est un appel à l'action. Pour toute la société haïtienne. Pour nous toutes et tous. Alors que je vous parle, le monde fait face à une régression des droits des femmes, marquée par des atteintes graves à leur dignité, la violence physique, la violence sexuelle et les féminicides.
En Haïti, presque une femme sur trois entre 15 à 49 ans est victime de violences physiques. Dans les quartiers les plus défavorisés, et parmi les communautés déplacées dans la capitale, Port-au-Prince, et dans les régions marquées par l'insécurité, particulièrement l’Artibonite, la prévalence de la violence faite aux femmes et aux filles est encore plus répandue. Une violence sexuelle, souvent très brutale.
Depuis mon arrivée dans le pays, je n'ai eu de cesse d'aller à la rencontre de survivantes. Dans des centres spécialisés, des écoles, etc. Et j’ai rencontré une jeune fille de 14 ans, qui déjà était mère à la suite d’un viol par des membres d’un gang armé.
J'ai pu constater de près leur douleur. J'ai pu écouter leurs histoires, leurs douloureux périples vers la reconstruction.
J'ai pu aussi ressentir leur espoir et aspiration à une vie meilleure. Et j'ai été impressionnée par leur résilience, leur courage et leur résistance, sans égale.
Et cela ne doit pas être négligé. Elle nous appelle à agir, maintenant, et de façon décisive.
Aujourd'hui, je veux témoigner de ma solidarité auprès de toutes ces femmes, mères, soeurs, filles, épouses, citoyennes et professionnelles de tout genre, qui ont été touchées, mais sont toujours debout.
La violence à l'égard des femmes et des filles en Haïti n'est pas récente.
Elle est ancrée dans des décennies d'injustice structurelle et de systèmes patriarchaux qui n'ont pas été bousculés. Dans toutes les sphères de la société.
En effet, on est tous engagés dans des cages qui obligent la société à agir en tant que femme ou en tant que fille ou garçon.
Mais ne nous y méprenons pas. Quand une femme ou une fille haïtienne est victime de violence, toute la société haïtienne est impactée. Nous en payons toutes et tous le prix. La violence a un coût dévastateur pour les femmes et les filles victimes. Elle limite leur participation dans toutes les sphères de la vie et les prive de leurs droits et libertés fondamentales. Mais la violence a également un coût tangible et intangible pour leur famille, leur communauté, leur entreprise, l'État entier.
Non seulement la violence à l'égard des femmes est légalement et moralement répréhensible, mais elle est un frein certain au développement durable et à tout progrès dans une société. Elle entrave la reprise économique équitable et la croissance durable dont le pays a pourtant tant besoin. Nos sociétés sont ainsi moins pacifiques, nos économies moins prospères, notre pays moins juste. Il est dès lors de notre devoir commun de mettre fin à ce fléau, à ce crime.
Je tiens à reconnaitre l'action du Gouvernement, particulièrement le Ministère à la Condition Féminine et aux droits des femmes, et des institutions publiques pour leur leadership visant à éliminer la violence faite aux femmes et aux filles en Haïti.
Je souhaite également saluer l'engagement des organisations de base, de femmes et de défense des droits des femmes dont les actions ont permis des avancées certaines dans cette lutte en Haïti. Les acteurs de la société civile et particulièrement les organisations féministes et féminines constituent nos meilleures armes pour une action plus intégrée entre les acteurs de développement, de la consolidation de la paix et les acteurs humanitaires.
Je souhaite également apprécier l'engagement de l'Union Européenne et de tous les partenaires techniques et financiers pour leur action aux côtés des agences des Nations Unies et du peuple haïtien dans ce combat, notamment au travers de l'initiative Spotlight.
Dans cette optique, une réunion s'est tenue mercredi dernier avec le gouvernement, la société civile et nos partenaires de développement pour réfléchir au renforcement de la réponse nationale à la problématique de la violence faite aux femmes et aux filles.
Mesdames et messieurs,
Aujourd'hui, je renouvelle l'engagement total des Nations Unies à continuer à soutenir chaque femme et fille en Haïti, ainsi que le Gouvernement, et à s'attaquer aux causes profondes de la violence sexuelle.
Un monde différent est possible. En Haïti, une société différente est possible.
Le thème choisi pour la campagne « Tous UniS » cette année - « Investir pour prévenir la violence à l'égard des femmes et des filles » - appelle chacun et chacune d'entre nous à agir.
Cela signifie :
Appuyer des lois et des politiques qui renforcent la protection des droits des femmes dans tous les domaines ;
Renforcer les investissements dans la prévention et le soutien aux organisations de défense des droits des femmes ;
Investir dans l’éducation civique ;
Écouter les survivantes et mettre fin à l'impunité des auteurs de violences, où qu'ils se trouvent ;
Garantir les droits sexuels et reproductifs de chaque femme ;
Soutenir les militantes et mettre en avant le rôle clé des femmes à tous les stades de la prise de décision ; et
Plus que jamais, garantir la voix et la participation active des femmes dans l'espace politique dans l'optique de la tenue d'élections dans un futur proche. Chères femmes, engagez-vous !
Chères femmes, engagez-vous !
Alors que la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme célèbre ses 75 ans cette année, levons-nous et exprimons-nous. Osons construire un monde qui refuse de tolérer la violence à l'égard des femmes, où que ce soit et sous quelque forme que ce soit. Une fois pour toutes.
Merci
Diskou fèt pa
Ulrika Richardson
RCO
Reprezantan Espesyal Adjwen, Kowòdonatè Rezidan ak Kowòdonatè Imanitè