Il faut tout un village : Répondre aux crises humanitaires en Haïti
Port-au-Prince
"lI faut taut un village pour élever un enfant", dit le dicton populaire, la même image est vraie pour illustrer les efforts collectifs nécessaires pour soutenir les personnes aux prises des crises humanitaires.
Cette année, le thème de la Journée mondiale de l'aide humanitaire, célébrée chaque année le 19 août, est "Il tout faut un village" et ONU-Haïti s'est penché sur le travail effectué par les partenaires humanitaires pour se soutenir mutuellement et venir en aide aux nombreuses personnes dans le besoin.
Une crise humanitaire s'est installée dans la commune de Cité Soleil à Port-au-Prince, alors que des gangs rivaux se battent pour le contrôle d'un quartier où vivent des populations parmi les plus vulnérables de la capitale. Les Nations Unies ont commencé à apporter de l'aide d'urgence dès juillet, et la cheffe des urgences de l'UNICEF, Dorica Tasuzgika Phiri, fait partie des premières équipes arrivées sur place.
“J'ai rencontré des femmes enceintes à Cité Soleil qui n'avaient jamais vu de médecin alors qu'elles n'étaient qu'à quelques semaines de leur date d'accouchement, et de nombreux nourrissons souffrant de malnutrition dont les mères ont admis qu'elles n'avaient pas été en mesure d'allaiter ou de trouver une alimentation appropriée pour leurs enfants. Les cliniques mobiles de santé et de nutrition étaient vraiment une lueur d'espoir et de nombreux patients nous ont remerciés et nous ont demandé de revenir tôt. J'étais vraiment fier de nous ce jour-là.
La section des urgences dirige la réponse de l'UNICEF aux besoins urgents des femmes et des enfants touchés par la violence des gangs et qui sont restés dans les zones touchées par le conflit, ainsi que des personnes déplacées internes qui ont fui le conflit. Une fois que nous avons eu le feu vert pour accéder à Cité Soleil, mon équipe a été la première sur le terrain dès le lendemain pour évaluer les besoins, dans le cadre d'une mission conjointe de l'ONU, et s'assurer que nous pouvions activer rapidement les premières réponses vitales pour les enfants et leurs familles.”
En août 2021, le sud d'Haïti a été frappé par un séisme dévastateur d'une magnitude de 7,2 qui a causé la mort de plus de 2 200 personnes et en a blessé 12 800 autres. Les agences humanitaires des Nations Unies se sont mobilisées pour venir en aide à quelque 500 000 personnes.
En s'appuyant sur les leçons tirées de la réponse au tremblement de terre de 2010 et à l'ouragan de 2016, les Nations Unies et ses partenaires ont fait équipe pour accélérer les opérations de secours et les efforts de relèvement. En tant que membre du pool de conseillers SURGE du PNUD, Nermine Mohamed Wally est arrivée pour soutenir l'équipe du PNUD en Haïti dans la coordination de sa réponse.
"J'ai été formée pour être envoyée dans des situations de crise à la suite de catastrophes. Le rôle d'une équipe SURGE du PNUD est d'apporter un soutien immédiat et ciblé à la population affectée dans un laps de temps très court.
Lorsque la crise frappe, les actions humanitaires traditionnelles se concentrent sur la réalisation de services vitaux tels que la nourriture, les kits de santé et les abris temporaires pour atténuer la souffrance. L'équipe SURGE du PNUD complète ces efforts en calibrant à nouveau les capacités locales et en travaillant avec la communauté et les acteurs locaux pour maintenir l'offre de services lorsque le personnel humanitaire se retire.
En trois jours, nous avons pu visiter trois départements et huit communautés parmi les plus touchés par le tremblement de terre.
Lorsque j'ai parlé avec les personnes qui ont perdu leur maison, j'ai été frappée par leur volonté de se relever et de retrouver leur vie - beaucoup travaillaient déjà à réparer ou à reconstruire."
La CONAPH (Coalition Nationale des Associations des Personnes Handicapées.) est une association de la Société civile haïtienne basée dans le Sud qui travaille à la promotion des droits et libertés fondamentales des personnes handicapées.
Emilio Neas est le Coordonnateur. "Travailler avec les personnes handicapées est pour moi un engagement fort. Le quotidien de ces personnes est particulièrement difficile, surtout après le tremblement de terre d’Aout 2021 car elles font face à des barrières sociales, environnementales et des discriminations qui les empêchent de s’épanouir au sein de leur communauté.
Aujourd’hui, je me prête ma voix aux milliers de personnes handicapées, surtout les femmes et les filles, les personnes âgées, affectées par le tremblement de terre qui sont trop souvent laissés de côté et invisibilisés. Nous luttons pour construire une société plus inclusive qui assure la dignité de tous, même en temps de crise."
Les communautés des zones rurales affectées par le tremblement de terre sont soutenues par l’initiative d’alimentation scolaire du Programme Alimentaire Mondial (PAM). Maguelita Varin, du PAM, affirme que cela aide les familles à emprunter la voie du relèvement.
« Les programmes d’alimentation scolaire dans la zone du séisme aident les communautés à se relever plus rapidement. Beaucoup d’enfants n'ont pas assez à manger à la maison, alors fournir de la nourriture à l’école les encourage à aller en classe et leur donne plus d’énergie pour étudier.
Nous travaillons aux côtés de l’UNICEF qui a fourni des manuels scolaires et des bureaux, ainsi que des installations de lavage des mains. Nous devons adopter une approche globale car si les enfants ne se lavent pas les mains avant de manger, ils risquent de tomber malades. Et s’ils n’ont pas de livres, ils ne peuvent pas étudier même s’ils ont bien mangé.
Nous avons des programmes d’alimentation scolaire qui servent de la nourriture provenant de l’étranger, mais aussi des programmes qui achètent localement des produits aux cultivateurs. Cela contribue à soutenir l’économie locale et, enfin de compte, aidera les communautés à se relever et à renforcer leur résilience”.
De nombreux Haïtiens tentent de quitter leur pays pour différentes raisons incluant l'insécurité, la violence des gangs armés, et le manque d’opportunités économiques. L'Organisation internationale pour les migrations (OIM) des Nations unies travaille avec des partenaires nationaux et locaux pour sensibiliser la population sur les risques liés à la migration irrégulière, notamment à la frontière entre Haïti et la République dominicaine.
L'OIM s'est associée à l'organisation féministe haïtienne Nègès Mawon. Ce partenariat a permis la sensibilisation des communautés frontalières sur les risques liés à la migration irrégulière et la traite des personnes, tout en encourageant la vaccination contre la COVID-19, et en faisant la promotion de la hotline 8840 de l’OIM.
L’un des points forts de cette campagne a été son déroulement à la fois dans les points officiels et non officiels de passage des migrants à la frontière entre Haïti et la République Dominicaine. Les communautés locales ont pu participer à des activités innovantes, telles que des séances de théâtre participatif, dont l’idée était d'élaborer une courte histoire mettant en lumière les principaux problèmes rencontrés par les migrants haïtiens. Un sketch a été créé, puis joué en public.
Les interventions du public ont permis de révéler les problèmes présents dans les communautés ciblées. Par exemple, les participants ont rapporté que le trafic d'êtres humains et la contrebande sont courants à Cerca la Source/Tilory.
Le secteur privé peut également jouer un rôle important à la suite de catastrophes humanitaires.
Fania Jospeh est la Directrice Exécutive de l'Alliance pour la Gestion des Risques et la Continuité des Activités (AGERCA).
“Nous coordonnons les actions de réponse du secteur privé et de la société civile en cas de crise ou de catastrophe. Nous faisons partie de l’initiative Connecting Business, un projet conjoint du PNUD et d’OCHA qui regroupe des dizaines d’organisations comme la nôtre dans le monde.
Depuis plus de 15 ans déjà, je travaille dans l’assistance humanitaire. Je suis heureuse de pouvoir assister les personnes les plus vulnérables pendant une catastrophe.
Grâce à l'AGERCA, le secteur privé se mobilise pour aider notre pays à mieux gérer les risques et les catastrophes.
Nous aidons à la coordination des dons reçus, la promotion de l'achat local, la logistique, le partage d’information.
Lors du dernier tremblement de terre l’année dernière, nous avons fourni plus d'une soixantaine de lignes téléphoniques pour les membres du Centre d'Opération d'Urgence.”