Une mère immunise sa fille contre le choléra car elle a peur de la perdre
Avec le soutien de l'UNICEF, Haïti lance une campagne pour vacciner environ 1,7 million de personnes contre le choléra.
Lorsque le choléra a refait soudain surface début octobre en Haïti, des mères comme Fabienne François craignent pour leur vie et celle de leurs enfants. La jeune femme de 24 ans n'a qu'un seul enfant, Rebecca Maurice, et fera tout pour la protéger des maladies évitables.
« J'ai peur du choléra car on dit beaucoup de choses sur cette maladie. Elle peut vous tuer. Beaucoup de gens m'ont déjà dit que certaines personnes sont mortes à cause de la maladie. Je ne veux pas perdre la vie ou perdre ma fille parce qu'elle est le seul enfant que j'ai », dit-elle.
Fabienne est arrivée au centre de santé Cité Canada à Turgeau, dans la capitale haïtienne Port-au-Prince, pour faire vacciner sa fille contre le choléra. La veille, elle avait rencontré une équipe de vaccinateurs juste après qu'Haïti ait lancé sa campagne de vaccination contre le choléra et reçu la dose de vaccin oral.
Le choléra a tué 300 personnes en moins de trois mois
Avec le soutien de l'Organisation panaméricaine de la santé (OPS), Haïti a reçu plus de 1,17 million de doses de vaccin oral contre le choléra le 12 décembre et 500 000 autres doses devraient arriver dans les semaines à venir. Les hommes, femmes et enfants de plus d'un an qui habitent dans cinq communes de l'Ouest et une du Centre où plus de 50 cas confirmés de choléra avaient été signalés au moment où Haïti a déposé sa demande de vaccination contre le choléra, sont ciblés par la campagne de vaccination.
La campagne de vaccination est lancée pour contribuer à freiner la transmission de la maladie. En moins de trois mois, le choléra a coûté la vie à 300 personnes avec plus de 1 200 cas confirmés et près de 15 000 cas suspects signalés. Plus de 40% des cas confirmés concernent des enfants de moins de 14 ans. Ainsi, la fille de Fabienne âgée de neuf ans est à risque.
La vie est dure en Haïti. Fabienne, comme beaucoup d'autres femmes, est touchée par la violence liée aux gangs et les troubles sociaux récurrents qui ont mis l'économie à genoux. La mère célibataire n'a pas d'emploi et compte souvent sur ses parents pour subvenir à ses besoins et à ceux de sa fille.
Dans son quartier, les gens parlent des effets dévastateurs du choléra et Rebecca comprend parfaitement pourquoi elle devrait être vaccinée. « Ma mère m'a amenée ici pour me faire vacciner contre le choléra. J'ai entendu dire que des gens meurent et je ne veux pas mourir parce que je ne veux pas perdre ma mère, ma mère et ma grand-mère », dit-elle.
La violence liée aux gangs est un défi à relever
L'UNICEF appuie le ministère de la Santé dans la livraison des doses de vaccin oral anti-choléra. Mais avec les gangs qui bloquent les routes nationales, transporter les vaccins ou déployer les équipes n’est pas chose facile. La plupart des populations ciblées par cette campagne de vaccination contre le choléra vivent à Cité Soleil ou à Port-au-Prince où les affrontements récurrents entre gangs armés continuent de faire des victimes parmi les femmes et les enfants.
« La maladie mortelle du choléra tue de plus en plus de personnes en Haïti. Le vaccin oral peut protéger des milliers de personnes contre la maladie. Mais les équipes de vaccination ne peuvent pas atteindre les communautés pendant que les balles volent, ou elles risquent d'être kidnappées. Les vaccinateurs mettent leur vie en danger pour sauver la vie des femmes et des enfants, alors qu'ils devraient avoir un accès illimité pour effectuer leur travail », déclare Bruno Maes, Représentant de l'UNICEF en Haïti.
L'UNICEF contribue à la fourniture de carburant pour maintenir opérationnels la chambre froide et le dépôt national de vaccins du département de l'Ouest, équipe plus de la moitié des équipes de vaccination en porte-vaccins pour maintenir les vaccins à la bonne température, et assure la disponibilité des incinérateurs et des sacs-poubelles pour gérer les déchets biomédicaux et réduire les risques de contamination.
Quelque 2 300 équipes de vaccination sont déployées du 18 au 28 décembre pour permettre à 97% de la population des communes cibles de recevoir le vaccin contre le choléra, être protégés de la maladie et rester en vie et en bonne santé.
C'est exactement ce dont Rebecca a besoin pour déployer tout son potentiel et réaliser son rêve. La petite fille pense par elle-même et même sa mère ne connait pas vraiment son rêve d’avenir. Quand elle a déduit qu'elle deviendrait avocate à l'avenir. « Avocate ?, pas question ! Je ne veux pas être avocate », a-t-elle répondu sèchement.